Recherche : étudier l’îlot de chaleur urbain grâce aux véhicules connectés
07/03/2022Avec le réchauffement climatique et la croissance urbaine, l’îlot de chaleur urbain expose une population de plus en plus nombreuse. Pour mieux le représenter et pallier au manque de mesures à fine échelle en milieu urbain, les climatologues utilisent des données collectées par la population (crowdsourcées) comme celles issues des thermomètres de véhicules connectés. Une étude pilotée par des chercheur.e.s de Météo-France vient d’être publiée sur l’utilité et la fiabilité de ces données.
L’îlot de chaleur urbain
Avec la densification des villes et la croissance urbain, une grande partie de la population est exposée à ce qu’on appelle l’îlot de chaleur urbain. Ce phénomène caractérisé par des températures plus élevées en ville qu'à la campagne à proximité est une préoccupation majeure de nos sociétés dans un contexte de changement climatique car l’îlot de chaleur urbain influe sur la santé et le confort thermique des habitants. Afin d’y faire face, urbanistes et décideurs ont besoin de données climatologiques précises pour proposer des solutions d’adaptation et d’aménagement adéquates.
Qu’est-ce que l’îlot de chaleur urbain ?
La nuit, la température en ville peut rester plus élevée que dans les zones rurales voisines ; il se crée ainsi une bulle de chaleur sur la ville, appelée îlot de chaleur urbain (ICU).
Un microclimat au cœur de la ville
En ville au contraire, les matériaux des bâtiments et des surfaces urbaines emmagasinent l'énergie solaire et la restitue à l'atmosphère urbaine. L'air au-dessus de la ville se refroidit donc moins qu'à la campagne générant ainsi l'ICU, phénomène essentiellement nocturne qui traduit l'écart de température observé entre une agglomération et les zones moins urbanisées alentour.
Le mécanisme de l'îlot de chaleur urbain
Améliorer les observations pour mieux représenter l’îlot de chaleur urbain
Il est toutefois difficile et coûteux de déployer, en ville, des réseaux de mesure à fine échelle. Les climatologues utilisent ainsi de plus en plus de données collectées par la population elle-même (données dites “crowdsourcées”). Une nouvelle étude menée par des chercheuses et chercheurs du CNRM (Météo-France/CNRS) en partenariat avec plusieurs laboratoires qualifie la pertinence et la fiabilité d’une nouvelle source de données issues des thermomètres de véhicules connectés. Les températures sont mesurées par des sondes placées sous les rétroviseurs ou sous le pare-choc avant.
L’étude compare la fiabilité de ces mesures à celles issues de réseaux météorologiques urbains comme à Rennes et Dijon. Elle montre que l’on obtient avec les véhicules connectés des données très proches de celles obtenues par des réseaux de mesure professionnels. Par cette méthode, le système d’observation est densifié et la cartographie à très fine échelle d’îlot de chaleur urbain de zones jusqu’alors non explorées devient possible. Cela permet d’améliorer l’identification des facteurs favorisant ou inhibant le phénomène d’îlot de chaleur urbain.
Les données collectées à l’été 2018 dans l’ensemble de l’Europe ont, par exemple, permis de visualiser l’effet du relief sur les températures mais également l’effet refroidissant des parcs. Cette nouvelle méthode permettra de mieux évaluer la capacité des modèles météorologiques à représenter l’effet d’îlot de chaleur et ainsi d’aider à mettre en place des mesures de prévention appropriées.
Îlot de chaleur nocturne médian lors d'une vague de chaleur à Paris du 01/08/2018 au 09/08/2018 à 200 m de résolution spatiale. Les observations provenant de véhicules roulant à moins de 10 km/h ne sont pas prises en compte.
Référence de l’étude (open access) : Marquès, E., Masson, V., Naveau, P., Mestre, O., Dubreuil, V., & Richard, Y. Urban heat island estimation from crowdsensing thermometers embedded in personal cars, Bulletin of the American Meteorological Society, https://doi.org/10.1175/BAMS-D-21-0174.1, 2022.