Presse Océan Atlantique Nord : un niveau de surchauffe inédit en 2023

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Océan Atlantique Nord : un niveau de surchauffe inédit en 2023

16/04/2025

Les températures de l’Atlantique Nord ont franchi un seuil critique en 2023, avec des effets néfastes pour la biologie et les ressources marines sur tout le bassin océanique. Une étude publiée ce 16 avril 2025 dans la revue " Communications Earth & Environment " révèle que cet événement extrême aurait été impossible sans l’accumulation des gaz à effet de serre due aux activités humaines. Les travaux menés par plusieurs chercheurs d’organismes français*, dont Météo-France, apportent les preuves que le caractère exceptionnel de 2023 s’explique par l’action combinée entre le réchauffement global d'origine humaine et la variabilité naturelle du climat venue l’amplifier.

L'Atlantique Nord est l'une des régions les plus touchées par le réchauffement climatique d’origine humaine. En 2023, ce bassin a enregistré des températures de surface en moyenne annuelle sans précédent, dépassant la valeur inédite de 2022 par un écart de 0,3 °C jamais enregistré jusqu’alors.

L’étude publiée aujourd’hui s'appuie sur des observations de l'océan combinées à des simulations climatiques, et démontre que le niveau de température observé aurait été impossible sans l’effet des activités humaines sur le climat. En effet, aucune simulation climatique pour la période de référence pré-industrielle n’inclue une telle valeur. Le saut spectaculaire en température entre 2022, déjà chaud, et 2023 résulte d’une circulation atmosphérique rare qui a généré un chauffage extrême de la surface de l'océan, dû à la faiblesse généralisée des vents et à une baisse de la couverture nuageuse dès le printemps 2023. 

Si la présence de ces conditions atmosphériques n’est pas directement attribuable à l'influence humaine sur le climat, ces dernières se sont révélées beaucoup plus impactantes dans le climat d’aujourd’hui pour faire grimper le thermomètre océanique en surface. En effet, la redistribution de la chaleur vers les profondeurs est considérablement réduite dans un bassin réchauffé par les activités humaines. L’océan se stratifie : l'énergie se trouve ainsi piégée en surface, qui se réchauffe rapidement et fortement. 

Dans le climat actuel, en considérant l’influence humaine et les variations naturelles du climat d’une année sur l’autre, voire d’une décennie à l’autre, l'étude estime à partir de simulations climatiques que le niveau de température observé en 2023 en moyenne sur tout l’Atlantique Nord avait environ une chance sur 10 de se produire (événement décennal), et une chance sur 100 dans les régions tropicales de l'Atlantique Nord (événement centenal), avec des valeurs localement plus exceptionnelles. 

Ces événements extrêmes océaniques restent rares mais sont désormais possibles dans un climat proche de +1,5 °C à l’échelle mondiale, et induisent des impacts majeurs sur les écosystèmes marins. Ils posent aussi des défis sociétaux concrets, notamment en matière d’économies littorales et de sécurité alimentaire via les ressources halieutiques perturbées.

L’étude montre qu’il est ainsi primordial de comprendre notre vulnérabilité face à ces extrêmes pour mieux anticiper leurs conséquences, tant en métropole qu'en Outre-mer. Elle confirme aussi que les modèles climatiques sont capables de simuler des événements de type 2023 : ils constituent des outils utiles pour l'anticipation des risques climatiques et la prise de décision en matière d’adaptation.

 

Consultez l’étude en ligne (en anglais) : Internal variability effect doped by climate change drove the 2023 marine heat extreme in the North Atlantic.

 

*Auteurs : Thibault Guinaldo (chercheur Météo-France au CNRM : Météo-France / CNRS), Christophe Cassou (Directeur de Recherche du CNRS au CECI-CERFACS & LMD-IPSL), Jean-Baptiste Sallée (Directeur de Recherche du CNRS au CNRM & LOCEAN-IPSL) et Aurélien Liné (Chercheur au CECI-CERFACS  et à l’IMFT Toulouse)