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Les vagues de froid les plus extrêmes amenées à disparaître sous l’effet du changement climatique
12/02/2025Les vagues de froid les plus remarquables observées ces dernières années à travers le monde ne se reproduiront probablement pas au cours du 21e siècle, en raison du changement climatique. C'est ce que démontre une étude récemment parue dans le Bulletin of the American Meteorological Society (BAMS) et conduite par Aurélien Ribes, Octave Tassiot et Julien Cattiaux, chercheurs au Centre national de recherches météorologiques (Météo-France/CNRS), et Yoann Robin, chercheur à l'Institut Pierre-Simon Laplace.
Les laboratoires impliqués
- Centre national de recherches météorologiques (CNRS/Météo-France)
- Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE-IPSL, CEA/CNRS/Université Versailles Saint-Quentin)
Le climat terrestre évolue fortement sous l’effet des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine, principalement du fait de la combustion de ressources fossiles. Dans ce climat plus chaud, la fréquence et la sévérité de nombreux phénomènes météorologiques (vagues de chaleur, sécheresses, précipitations intenses…) sont modifiées, avec des conséquences fortes et croissantes pour toutes les sociétés humaines. Parmi les phénomènes météorologiques à forts impacts figurent les vagues de froid, dont il est observé et anticipé que la fréquence et l’intensité diminuent dans un climat plus chaud.
Existe-t-il encore un risque de revivre des événements comparables aux vagues de froid les plus intenses dont nous nous souvenons ? Plusieurs chercheurs ont réalisé une analyse statistique de la probabilité que des vagues de froid extrêmes telles que celles survenues lors des dernières décennies, par exemple en 2012 sur l’Europe de l’Ouest, se reproduisent au cours du 21ᵉ siècle.
Début février 2012, la France a fait partie des pays concernés par des températures très basses et des chutes de neige significatives, en raison d’une situation météorologique particulière ramenant un air très froid depuis la Russie. L’étude d’attribution effectuée démontre que la probabilité qu’un événement d’une telle intensité se reproduise aurait été environ quatre fois plus élevée sans l’influence des activités humaines.
La probabilité de revivre une vague de froid telle que celle de 2012 est désormais tellement faible que cet événement a peu de chances de se reproduire au 21ᵉ siècle. L’étude estime qu’il y a près de 9 chances sur 10 qu’un événement météorologique aussi froid ne survienne pas à nouveau d’ici 2100.
Des conclusions similaires peuvent être tirées pour les trois autres vagues de froid remarquables étudiées ici : en Chine en 2016, au Texas en 2021 et au Brésil en 2022.
« Les résultats de nos recherches suggèrent que les vagues de froid les plus intenses, et les paysages glacés qui leur sont associés dans les régions de latitude moyenne, sont en train de disparaître ou bien ont déjà disparu en raison du changement climatique d’origine humaine » précise le climatologue Aurélien Ribes, qui a piloté cette étude du côté de Météo-France.
En France, la dernière vague de froid référencée par Météo-France remonte à février 2018. Ces épisodes sont devenus plus rares, moins longs et moins intenses au cours des 35 dernières années, par rapport à la période précédente. Ainsi, les quatre vagues de froid les plus longues et les plus sévères dans notre pays (février 1956, janvier 1963, janvier 1985 et janvier 1987) ont été observées il y a plus de 30 ans. La probabilité de revivre des événements aussi froids au 21ᵉ siècle est désormais très faible – seulement 1 % pour le niveau de froid atteint en 1985, par exemple.
Outre des impacts attendus sur les infrastructures de transport ou d’énergie, la disparition des vagues de froid affecte également les écosystèmes naturels, le froid hivernal jouant comme un facteur protecteur pour le développement de certaines espèces. La diminution de l’intensité des vagues de froid est à mettre en parallèle avec l’évolution des vagues de chaleur, qui deviennent plus intenses et plus fréquentes sous l’effet du réchauffement climatique.
Alors que les vagues de froid les plus extrêmes sont amenées à disparaître, de nombreuses études récentes indiquent que des vagues de chaleur dépassant largement les valeurs historiques actuellement connues se produiront dans les décennies à venir. L’évolution des vagues de chaleur comme des vagues de froid sont deux manifestations attendues du réchauffement climatique induit par les émissions humaines de gaz à effet de serre, et l’amplitude des changements à venir dépendra des émissions futures à l’échelle planétaire.
Ce travail a bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence nationale de la Recherche au titre de France 2030 portant la référence ANR-22-EXTR-0005, dans le cadre du Programme de recherche TRACCS (PEPR Climat).