
© Météo-France / L’Œil du climat / Laurence Delanoë
Antilles-Guyane : le suivi des sargasses
16/04/2025À la suite d’un événement de variabilité climatique au cours de l’hiver 2009-2010, des agrégations de sargasses ont dérivé depuis la mer des Sargasses vers l’océan Atlantique tropical où elles ont trouvé des conditions favorables à leur développement et à leur maintien. Ainsi, depuis 2011, les Antilles françaises (Martinique, Guadeloupe, Saint-Martin, Saint-Barthélémy…) et la Guyane connaissent des arrivées massives d’algues sargasses sur leurs côtes. Pour faire face à ce fléau, les pouvoirs publics se mobilisent. Météo-France a pour missions de surveiller les bancs de sargasses et élaborer un bulletin régulier de suivi pour ces zones impactées.
Consultez les bulletins de suivi des sargasses pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane.
Les sargasses, qu’est-ce que c’est ?
Les sargasses sont des algues brunes. Deux espèces de sargasses se développent dans l’Atlantique tropical. Elles sont dites holopélagiques, c’est-à-dire qu’elles réalisent l’ensemble de leur cycle de vie à la surface de l’eau grâce à des vésicules remplies d’air. Sous l’action des courants et des vents, elles s’agrègent sous forme de radeaux et dérivent à la surface de l’océan.
Les sargasses sont-elles dangereuses ?
En mer, ces radeaux sont des niches de biodiversité et servent de refuge pour un grand nombre d’espèces marines. Cependant, lorsque les sargasses s’échouent en grande quantité sur les plages des Caraïbes, elles se décomposent et des gaz sont émis, notamment l’hydrogène sulfuré (H₂S) et l’ammoniac (NH3), qui peuvent impacter la santé humaine selon leur concentration et la durée d’exposition à ces gaz.
Au-delà des effets sur la santé, l’accumulation et la décomposition des sargasses impactent également les littoraux et certaines activités socio-économiques telles que la pêche et le tourisme.
Y a-t-il une saison des sargasses ? Quelles sont les régions les plus touchées ?
Les sargasses se développent dans l’Atlantique tropical durant l’hiver et arrivent sur les côtes antillaises principalement au cours du printemps et de l’été, affectant particulièrement les littoraux exposés à l’est.
D’autres régions sont également concernées par ces échouements : les côtes occidentales de la mer des Caraïbes, les côtes nord-est de l’Amérique du Sud ainsi que les littoraux de l’Afrique occidentale, de la Sierra Leone jusqu’au golfe de Guinée.
Comment surveiller les sargasses ?
Dans le cadre d’une convention passée en 2018 entre le ministère de la Transition écologique et solidaire et Météo-France, un dispositif de surveillance et de détection des algues sargasses, harmonisé et renforcé sur le secteur des Antilles françaises et de la Guyane, a été mis en place. L'établissement opère un système de prévision et de suivi des échouements, à l’aide de données d’observation satellitaires et de simulations de la dérive des bancs de sargasses détectés.
Météo-France élabore depuis 2019 un bulletin de risques d'échouements de sargasses sur les Antilles françaises et la Guyane. Dans le cadre de la mission Sargasses (Plan National I & II), le dispositif de surveillance et de prévision des échouements de sargasses est depuis 2023 une mission institutionnelle de l’établissement.
Anticiper le risque d'échouement des sargasses
Le dispositif vise à détecter les radeaux de sargasses et à croiser leur présence avec la courantologie et les vents, en vue d’estimer le risque d’échouement de ces algues sur les côtes surveillées. Les outils déjà développés par Météo-France dans le cadre de ses missions de surveillance de la surface de la mer, notamment en cas de pollution, sont mis à profit et adaptés pour la prévision de dérive des sargasses.
Ce dispositif repose sur 3 grands volets :
- tout d’abord, la télédétection : où se trouvent les sargasses ? Grâce à l’expertise en télédétection du Centre d’Etudes en Météorologie Satellitaire, un groupe du Centre National de Recherches Météorologiques, la détection des bancs en formation ou en dérive est possible sur l’ensemble de l’Atlantique tropical ;
- ensuite, anticiper les risques : une fois ces bancs détectés, Météo-France utilise “MOTHY” (Modèle Océanique de Transport d’Hydrocarbures), son modèle de dérive en mer. Initialement créé pour le suivi des pollutions marines comme les hydrocarbures, MOTHY permet, grâce à des données croisées (vents et courants) de prévoir leur déplacement et de définir les zones probables d’échouements ;
- enfin prévenir : dès qu’une alerte se dessine, les agents de Météo-France Antilles-Guyane élaborent un bulletin expertisé, hebdomadaire à bi-hebdomadaire suivant le niveau d’alerte, informant sur le risque d’échouements des bancs à 4 jours et complété par une tendance à 15 jours et 2 mois.
Météo-France poursuit et améliore en permanence ses outils de détection et de prévision d'échouements de sargasses afin d'anticiper au mieux leurs impacts, informer les populations et accompagner les territoires dans leur gestion de cette problématique.