Observer et prévoir La chaîne de prévision du temps

Météo-France

Comment fait-on une prévision ?

09/10/2021

La prévision météorologique est élaborée en trois étapes fondamentales : l'observation, la simulation de l'évolution de l'atmosphère à l'aide des modèles numériques et l'analyse des résultats par les prévisionnistes.

De l'observation à la prévision expertisée, en passant par l'assimilation des données et la modélisation : pour affiner les prévisions, les améliorations portent sur l'ensemble de la chaîne.

De l'observation à la prévision expertisée, en passant par l'assimilation des données et la modélisation : pour affiner les prévisions, les améliorations portent sur l'ensemble de la chaîne. © Météo-France.

Recueillir les observations et assimiler les données

Pour prévoir le temps qu'il fera demain, il faut déjà connaître le temps qu'il fait aujourd'hui. Plus on veut aller loin dans le temps, plus la zone sur laquelle il faut caractériser le temps qu'il fait doit être étendue. L'observation constitue ainsi la première étape d'une prévision. 90 % des données d'observation utilisées par les modèles de prévision de Météo-France proviennent des satellites météorologiques. Les 10 % restants sont fournis par des stations au sol, des radiosondages, des capteurs embarqués sur des avions de ligne et des navires de commerce ou installés sur des bouées ancrées et dérivantes. Météo-France reçoit aussi des autres services météorologiques des mesures recueillies sur l'ensemble du globe.

Toutes ces observations sont ensuite traitées pour en extraire les informations " utiles " au modèle de prévision : on parle d'assimilation des données. Environ 22 millions de données d'observations sont utilisées chaque jour par les modèles à l'issue de l'étape d'assimilation. Les données issues des observations sont combinées à d'autres informations, comme des prévisions très récentes, pour établir un état initial de l'atmosphère que le modèle saura utiliser.

Simuler le comportement de l'atmosphère en trois dimensions

À partir de cet état initial, les modèles simulent l'évolution de l'atmosphère en tenant compte bien sûr des lois qui gouvernent son évolution (mécanique des fluides, changement d'état de l'eau, turbulence, rayonnement...). Ils découpent l'atmosphère en une grille en trois dimensions aux mailles plus ou moins larges.

Pour décrire l'état de l'atmosphère et effectuer leurs calculs, les modèles numériques de prévision du temps et du climat découpent l'atmosphère en boîtes élémentaires contenant chacune une valeur de pression, de vent, de température, d'humidité... Sur l'horizontale, ce découpage est défini par la distance de maille de la grille du modèle, et sur la verticale, par le nombre de niveaux du modèle. Distance de maille et nombre de niveaux varient selon la finesse souhaitée, la puissance de calcul disponible, la vocation du modèle (prévision à courte échéance, simulation climatique, prévision saisonnière...). 

Pour les phénomènes dépassant la taille de leur maille, les modèles suivent ces lois physiques en toute rigueur. En revanche, les phénomènes plus petits ne sont pas " décrits " explicitement dans le modèle. Ils sont pris en compte par le biais d'algorithmes spécifiques qui simulent leur influence moyenne à l'intérieur des mailles du modèle.

Pour effectuer les milliards de calculs nécessaires à la résolution des équations mathématiques simplifiées qui traduisent l'évolution de l'atmosphère, Météo-France utilise deux supercalculateurs depuis 2014.

L'analyse des simulations par les prévisionnistes

Les résultats des simulations effectuées par les modèles ne sont pas encore des prévisions météorologiques. Il s'agit de scénarios d'évolution des principaux paramètres météorologiques en tous les points de la grille qui représente l'atmosphère.

L'expertise des prévisionnistes est indispensable pour analyser ces résultats complexes et les traduire en informations concrètes. Ils choisissent parmi les différents scénarios celui qui apparaît comme le plus probable et le déclinent en « produits de prévision » adaptés aux utilisateurs, à savoir des cartes et des bulletins de prévision.

Les prévisionnistes caractérisent aussi les risques de phénomènes dangereux et prennent les décisions relatives à la vigilance. De plus, ils assurent un contact direct avec certaines catégories d'utilisateurs, comme les services en charge de la sécurité civile en France.

Pour analyser au mieux ces simulations, les prévisionnistes utilisent différentes techniques de prévision, en fonction notamment de l'échéance :

La prévision déterministe

Pour les échéances allant de quelques heures à 3 ou 4 jours, on peut employer une technique appelée prévision « déterministe ». Elle repose sur l'utilisation de modèles numériques de prévision du temps, qui simulent le comportement de l'atmosphère.
La première étape de la prévision déterministe consiste à établir à partir des observations une représentation cartographique du temps qu'il fait, c'est-à-dire un état initial de l'atmosphère. Le modèle calcule ensuite l'évolution des paramètres météorologiques (pression, température, vent) au fil du temps. En partant d'un état déterminé de l'atmosphère, le modèle élabore un seul scénario d'évolution de ces paramètres, c'est pourquoi on parle de prévision « déterministe ».
Les simulations sont ensuite analysées par un prévisionniste qui connaît les limites du modèle. Il ajuste, modifie et traduit les résultats en termes de temps « observable », comme la durée et l'intensité des précipitations, les températures minimales et maximales, l'apparition d'orages, de rafales de vent ou de brouillards. Mais, cette approche déterministe ne permet pas d'évaluer les incertitudes qui pèsent sur l'unique scénario de prévisions retenu.

La prévision d'ensemble

Chaque étape de la prévision du temps comporte des incertitudes qui peuvent peser sur la qualité de la prévision finale. Les innovations dans le domaine de la mesure et les recherches sur les processus atmosphériques permettent de réduire petit à petit les sources d'incertitude. Mais l'atmosphère a un comportement chaotique et c'est une réalité physique qui nous échappe.

Au lieu de s'en tenir à une approche déterministe qui produit un unique scénario d'évolution pour chaque cartographie du temps qu'il fait, les prévisionnistes utilisent donc de plus en plus une méthode qui permet de tenir compte de ces incertitudes : la prévision d'ensemble (ou probabiliste). Elle consiste à réaliser des simulations à partir de plusieurs descriptions de l'état initial de l'atmosphère différentes. Ces dernières ne sont pas choisies au hasard : elles sont représentatives des incertitudes identifiées qui pèsent sur les mesures. La prévision d'ensemble fournit ainsi plusieurs scénarios d'évolution de l'atmosphère. Leur convergence ou leurs divergences renseignent les prévisionnistes sur la probabilité d'occurrence de chaque scénario : ils peuvent ainsi choisir le plus probable et quantifier l'incertitude qui pèse sur cette prévision.

Cette quantification de l'incertitude permet notamment aux prévisionnistes d'assortir leurs prévisions au-delà de 4 jours d'un indice de confiance. Ce chiffre de 1 à 5 accompagne les prévisions. Plus le prévisionniste estime que la prévision est fiable, plus l'indice de confiance qu'il choisira sera élevé (1 : confiance très faible, 5 : confiance très élevée).
Des informations probabilistes sont également proposées pour les phénomènes de précipitations et de gel, sous forme de pourcentages de probabilité.

 

Exemple de prévision d'ensemble. © Météo-France.

La prévision immédiate

La prévision immédiate concerne le très court terme : de quelques minutes à quelques heures. Ces prévisions servent par exemple aux prévisionnistes à faire le suivi temporel et spatial fin des épisodes météorologiques dangereux, comme les épisodes méditerranéens, notamment lors de vigilance météorologique orange ou rouge. Dans le cadre de ses activités commerciales, Météo-France est aussi amené à surveiller le risque de pluie pendant des événements sportifs ou culturels : il s'agit alors de fournir des chronologies très précises des épisodes pluvieux pour les heures à venir. Les prévisions immédiates sont aussi utilisées dans d'autres domaines, comme l'aviation ou le transport routier.

L'élaboration de ces prévisions s'appuie sur l'utilisation des observations. En effet, le modèle numérique de prévision Arome assimile toutes les 6 heures les données issues des observations et fournit des prévisions jusqu'à 48 heures d'échéance. La méthode d'assimilation des données, suffisante pour assurer la qualité des prévisions au-delà de quelques heures, en limite la qualité pour les premières échéances. Pour prévoir le temps dans les heures qui viennent, les prévisionnistes combinent donc les informations délivrées par Arome avec des extrapolations des données d'observation, notamment des images radar et satellite.

Évaluer les prévisions, une étape indispensable pour améliorer les techniques

Comme ses homologues étrangers, Météo-France procède systématiquement à l'évaluation a posteriori de ses prévisions. Cette évaluation est une étape indispensable pour améliorer les méthodes et les techniques. On vérifie ainsi l'ensemble de la production, que ce soit les résultats bruts des modèles numériques ou les prévisions finalisées qui ont été diffusées aux utilisateurs. 

La vérification des prévisions montre que la prévision du type de temps à 24 heures d'échéance sur la France est juste dans environ 90 % des cas, et que la prévision de température à 24 heures d'échéance en un point donné a une précision moyenne de l'ordre de 1 à 1,25 °C. À 7 jours, la précision est de l'ordre de 3 °C.

Un jour gagné tous les dix ans, grâce aux travaux de recherche

Les performances des prévisions sont en constante amélioration. Sur les trente dernières années, la qualité des prévisions du modèle Arpège de Météo-France a gagné un jour tous les dix ans : aujourd'hui, les prévisions à cinq jours sont aussi fiables que les prévisions à trois jours au début des années 2000. 
Cette amélioration est le fruit des travaux de recherche menés par Météo-France et ses partenaires sur chacune des étapes de la réalisation d'une prévision, dans les domaines de l'observation (satellites comme Metop), de la modélisation et de l'expertise. Elle est permise grâce à l'augmentation de la puissance de calcul des ordinateurs utilisés pour la modélisation.

Qu'est-ce que la prévision saisonnière ?

La prévision saisonnière consiste à prévoir la moyenne trimestrielle de paramètres météorologiques (température, précipitations) pour les mois à venir, à l'échelle d'une zone comme l'Europe de l'Ouest.
Il ne s'agit pas de prévisions classiques (limitées à une dizaine de jours) décrivant dans le détail des situations météorologiques.

La prévision saisonnière a pour objectif de déterminer le climat moyen du trimestre à venir. Ces prévisions indiquent le scénario le plus probable parmi trois scénarios prédéfinis : proche, en dessous ou au-dessus de la moyenne. Ce qui donne pour la température « chaud », « normal » ou «froid », et pour les précipitations, « humide », « normal » ou « sec ». On cherchera par exemple à déterminer si l'été prochain sera en moyenne chaud et sec ou froid et humide en Europe de l'Ouest.

Pour les réaliser, on utilise, comme pour les prévisions classiques, des modèles (simulations informatiques) planétaires. Mais ceux-ci reproduisent en plus le comportement d'autres milieux en forte interaction avec l'atmosphère, comme l'océan. À l'échelle de la saison, l'évolution de l'atmosphère est fortement influencée par la variation océanique. Elle peut engendrer par exemple des conditions favorisant un passage très au nord des perturbations atlantiques, ou qui vont modifier radicalement les zones soumises à de fortes pluies dans les tropiques, ou encore qui vont générer de fortes chaleurs et sécheresses.

Les performances des prévisions saisonnières sont très variables selon le lieu, la saison et le paramètre météorologique concerné. Elles sont meilleures pour la température que pour les précipitations, et pour la température, meilleures en hiver qu'en été. Elles sont très informatives dans la ceinture intertropicale, sur le pourtour du Pacifique. En revanche, la prévisibilité de la température en Europe de l'Ouest, sans être nulle, reste faible. Ceci est dû aux caractéristiques de la circulation générale de l'atmosphère au-dessus de l'océan Atlantique aux latitudes tempérées.