Comment évaluer la part du changement climatique dans un épisode particulier ?
08/10/2021Vagues de chaleur, épisodes de pluies intenses, records de températures… La France est de plus en plus exposée aux extrêmes climatiques. Mais comment attribuer un événement climatique particulier au changement climatique ? Comment évaluer son impact sur sa fréquence et son intensité ?
Les experts du climat utilisent des méthodes d’analyses statistiques pour évaluer les liens entre l’intensité et l’occurence des événements climatiques extrêmes et le changement climatique d’origine humaine.
Quelques exemples en France et dans le monde
- Le 25 juillet 2019, les températures mesurées sur de nombreuses stations météorologiques du nord de la France ont dépassé 40 °C pour la première fois depuis le début des relevés, atteignant même localement 43 °C. Le lien de ces canicules avec le changement climatique d’origine humaine est clair : des études d’attribution ont montré qu’elles ont désormais au moins 5 à 10 fois plus de chances de se produire qu’en 1900, et pourraient être 4 fois plus fréquentes en 2040 qu’actuellement.
- Du 14 au 18 septembre 2020, la France a connu une vague de chaleur remarquable pour la saison. Les climatologues ont montré que le changement climatique a ainsi rendu cet événement environ 12 fois plus probable (estimation entre 5 et 100) ; et 1,5 °C (estimation entre 1 °C et 2,1 °C) plus chaud que s’il s’était produit dans un climat non modifié.
- La Sibérie a subi en 2020 une vague de chaleur sans précédent, avec des températures moyennes supérieures de plus de 5 °C à la normale de janvier à juin. Du jamais vu à cette latitude aussi au nord de la planète.
Nous avons calculé la probabilité que de tels événements se produisent dans le climat actuel, et nous l'avons comparé à la probabilité qu'ils se soient produits dans le climat passé non modifié par l'homme en prenant pour référence l'année 1900, où on suppose l'influence humaine négligeable.
Il en ressort que le risque de chaleur prolongée qu'a connue la Sibérie de janvier à juin de cette année a été multiplié par au moins 600 sous l'influence du changement climatique.
Ces épisodes extrêmes auraient été presque impossibles dans le passé. Leur occurrence est clairement attribuée au réchauffement climatique d'origine humaine.
De tels épisodes sont nettement plus chauds et plus fréquents dans un climat modifié par l'activité humaine.
Météo-France participe à l'organisation World Weather Attribution pour mener ces expertises et analyser la part du changement climatique provoqué par l'homme dans des épisodes climatiques du monde entier.
Comment parvient-on à ces résultats ?
Pour évaluer les effets du changement climatique sur un évènement particulier, les climatologues de Météo-France considèrent un grand nombre de simulations climatiques couvrant l'ensemble de la période historique depuis 1850. À partir de ces simulations, est estimée la probabilité d'observer en 2020, par exemple, une vague de chaleur au moins aussi forte que celle effectivement observée. Le calcul est fait alternativement dans le monde factuel (incluant l'influence humaine) et dans le monde contrefactuel (sans perturbation humaine du climat). Sont alors comparées les deux probabilités obtenues pour quantifier l'importance de l'influence humaine. Le même procédé est utilisé pour évaluer l'impact sur l'intensité, cette fois-ci en raisonnant à probabilité d'occurrence donnée.
Les climatologues s’interrogent enfin sur l’évolution future de ce type d’évènement en utilisant des projections climatiques, c'est-à-dire des simulations couvrant le futur (souvent le XXIe siècle), avec une certaine hypothèse sur l'évolution des concentrations atmosphériques des gaz à effet de serre. À noter que l'influence du scénario est limitée pour les 20 prochaines années mais nettement plus sensible au-delà. Les analyses sont donc souvent limitées à l’échéance 2040.